Orgy of the Dead (1965)

Genre : spectacle calamiteux semi-érotique

A Masterpiece of Erotic Horror!

Revue : Michel Pagel

Scénario : Ed Wood Jr. C’est tout dire, penserez-vous. Eh bien, non. En général, on se rappelle Ed Wood pour ses films d’horreur ou de sf en oubliant qu’il a aussi tourné ou écrit, parfois les deux, nombre de pellicules sexy ou érotiques. "A Masterpiece of Erotic Horror !" annonce fièrement la jaquette de la cassette anglaise, ce qui fait trois mensonges en cinq mots. Pas mal.

Le héros et l’héroïne, qu’on ne saurait qualifier d’acteurs, jouent un metteur en scène et sa comédienne principale, qui roulent en pleine nuit, puis en plein jour, puis en pleine nuit, puis en plein jour, selon que la scène est filmée en plan général ou en gros plan, alors que leur dialogue se poursuit sans discontinuer. C’est à ce genre de détails qu’on reconnaît une perle. Sur une petite route de campagne, ils ont un accident, perdent connaissance, et se retrouvent dans un endroit mystérieux où le prince des ténèbres et sa reine du mal se repaissent du spectacle de la pénitence des damnées. Des damnées uniquement, pas des damnés : on est dans un nudie. Spectacle auxquels nos héros, attachés à des poteaux de torture, sont forcés d’assister.

Le prince des ténèbres est joué par Criswell, un médium de la télé américaine, qui a tourné quelques navets fantastiques. Au début du film, on le voit allongé dans son cercueil, puis assis. Si nous sommes privés du plan où il se redresse, c’est parce que trop vieux et trop malade, il en était incapable. Les séries Z sont souvent le dernier refuge d’acteurs âgés, vaguement célèbres à une époque, et dont plus personne ne veut. C’est aussi une constante des films catastrophe à gros budget des années 70. Il y a sans doute un parallèle intéressant à en tirer, mais peut-être pas, et de toute façon, ce n’est pas le moment. Vous me direz : jusque là, ça ressemble bel et bien à un film d’horreur. Certes, sauf que la pénitence des damnées dont il est question ci-dessus n’est en fait qu’une succession de numéros de strip-tease. Une dizaine de filles (jolies, au demeurant), déguisées de toutes les manières imaginables, s’effeuillent gentiment à raison d’une toutes les cinq minutes pendant la totalité du film. Comme on est en 1965, elles gardent leur culotte. Certaines savent danser, d’autres nettement moins, d’autres pas du tout. La photographie étant, une fois n’est pas coutume, relativement soignée, ces numéros sont parfois agréables à l’œil, mais dans l’ensemble, il faut bien l’admettre, plutôt ennuyeux. L’intérêt du film réside dans les séquences mettant en scène Criswell, sa copine, les héros et tout un tas de personnages, dont un loup-garou et une momie qu’on ne peut même pas qualifier de ridicules tant le terme est faible. Tous ces guignols commentent les numéros, et discutent à qui mieux mieux, de tout et de n’importe quoi. Même le loup-garou et la momie — le premier entrecoupant ses répliques stupides de multiples « arf ! » dignes d’un chihuahua asthmatique.

Et l’érotisme, là-dedans ? A moins de considérer comme érotiques les trémoussements des pin-ups en slip, l’érotisme, tintin. Si, tout de même. Sur la fin, la reine du mal s’approche de l’héroïne, lui ouvre son chemisier et se prépare à lui faire subir des choses que la morale réprouve. Enfin ! Et qu’est-ce qui arrive, à ce moment-là ? Je vous le donne en mille ! L’aube ! C’est l’aube qui arrive, encore un coup, et quoique n’étant pas des vampires, ou alors j’ai mal compris, le prince des ténèbres et les autres ont eux aussi oublié de regarder leur montre et se sont laissé surprendre — ce qui leur vaut d’être illico changés en squelettes. Ensuite, nos héros se retrouvent allongés près de leur voiture, insconscients mais indemnes. Car ce n’était qu’un rêve. Original, non ?

Orgy of the Dead est, c’est indéniable, un must pour les amateurs de couenneries. Toutefois, à moins qu’ils ne soient aussi fanatiques de danse exotique, comme on dit, je leur conseillerais de ne pas trop éloigner leur doigt de l’avance rapide pendant les numéros musicaux.

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