The brain that wouldn't die

Genre : j'ai mal à la tête

Fiche technique

Revue : Michel Pagel

THE BRAIN THAT WOULDN'T DIE, Joseph Green, 1959

Dans la série, "ils n'ont pas usurpé leur réputation", celui-ci se pose un peu là.

Pourtant, ça commence plutôt soft : dans une salle d'opération, le chirurgien chef vient de perdre son patient après avoir "tout essayé". Son assistant, qui se révélera bientôt être son fils, Bill, demande alors la permission d'essayer une technique à lui. J'ai pas bien compris en quoi ça consiste, mais je pense que le scénariste/metteur en scène non plus, et en tout cas, ça marche. Après nous avoir montré un superbe crâne de mannequin décalotté pour exposer un cerveau en plastique, on nous annonce que le patient revit. Chouette.

S'ensuit une conversation entre le père et le fils, le premier mettant en garde le second qui, selon lui, usurpe les prérogatives de Dieu (déjà entendu ça quelque part, tiens). Bill n'en a visiblement rien à foutre. Ce dialogue se poursuit tandis que nos deux chirurgiens se lavent les mains, mais comme ils sont filmés de face, on a l'impression qu'ils sont aux pissotières. C'est le premier vrai détail qui fait supposer le nanar gratiné. Arrive Jan, la fiancée de Bill, avec laquelle ce dernier va passer le week-end dans leur maison de campagne, tandis que papa s'en va à un congrès. Très vite, on comprend que Bill utilise ladite maison pour ses expériences. Ayant reçu un coup de fil de son assistant, Curt, qui le presse de venir, Bill appuie un peu trop sur l'accélérateur, rate un virage, et c'est l'accident bête. Lui-même est éjecté du véhicule, mais Jan y passe.

Bill, cependant, n'est pas du genre à se laisser décourager par de petits détails bêtes. Otant sa veste, il en enveloppe quelque chose qu'on ne nous montre pas, mais qui a en gros la taille d'un ballon de foot. Qu'est-ce que ça pourrait bien être, mon dieu ? Ensuite, il rejoint la maison de campagne à pied. Ladite maison, on en voit en tout et pour tout l'entrée et le laboratoire façon Frankenstein qu'il s'est aménagé à l'intérieur. Vous croyez quand même pas qu'on allait louer un manoir avec le budget riquiqui qu'on avait, non ?

Notre chirurgien est accueilli par Curt, lequel possède un bras flétri mais semble par ailleurs parfaitement normal. A part une vague obsession qui le pousse à demander à son patron d'aller jeter un coup d'oeil dans le placard. "Pas le temps," répond l'autre, en précipitant au labo et en se mettant fébrilement au travail. Le résultat de cette activité frénétique, vous l'avez tous vu en photo : la tête de Jan, posée sur un plateau, alimentée par diverses perfusions, entourée d'appareils à trois sous, et VIVANTE ! Eh oui, vous avez bien lu : le nouveau sérum inventé par Bill est efficace. Maintenant, ne reste plus qu'à trouver un corps pour mettre sous la tête, et en avant la lune de miel.

Avant d'entamer ses recherches, Bill accepte néanmoins de jeter un coup d'oeil dans le placard, dont la porte est fermée par un cadenas mais dispose d'un judas. Ce qu'il y voit semble nettement le troubler, mais ça ne l'empêche pas de partir draguer en boîte. Non, non, je ne plaisante pas : à peine arrivé dans la boîte en question, où se produisent des danseuses fort peu vêtues pour l'époque, il échange trois mots avec l'une d'entre elles et l'emmène dans l'arrière salle. Au moment où il va la convaincre de l'accompagner chez lui, en arrive une deuxième qui lui casse salement son coup. Dépité, il s'en va, tandis que les deux filles commencent à se crêper le chignon : la scène se conclut par un bref plan sur un dessin de deux chats, tandis que la bande sonore fait "miaou". C'est un "catfight", get it ? De l'allégorie de ce niveau-là, mes amis, c'est presque du Bergman.

Bon, on ne reverra plus les deux danseuses, ce qui nous permet de conclure que cette scène ne sert strictement à rien, sinon à allonger le métrage. Pendant ce temps-là, Jan s'est réveillée et n'est pas très contente d'être réduite à l'état de tête sans corps. Elle demande qu'on la laisse mourir, ce que personne ne semble décidé à faire. Tandis qu'elle s'engueule avec Curt, lequel reste au service de Bill dans l'espoir qu'il puisse un jour lui greffer un nouveau bras, elle l'informe que le sérum lui a conféré des pouvoirs, et notamment celui de commander à la chose dans le placard (dont on nous dit qu'il s'agit d'un être assemblé à partir de portions de corps récupérées à l'hôpital, après des amputations. Ça me rappelle aussi quelque chose, mais on va pas chipoter. Pour le prouver, elle commande à la chose de cogner contre la porte. Très impressionnant.

Bill revient pour dormir un peu et, dès le lendemain matin, repart à la chasse aux corps. A force de se balader dans sa bagnole en lorgnant les passantes, il tombe sur une ancienne copine qu'il songe à utiliser chirurgicalement, mais ils sont rejoints par une autre fille (encore), ce qui fait un témoin gênant. Donc, en fait, il les accompagne à l'élection de "miss body beautiful". Ah, ah, se dit le spectateur, c'est bon, il va kidnapper la gagnante. Eh bien, pas du tout. Encore une fois, la scène ne sert strictement à rien, sinon à montrer quelques jolies filles en petite tenue. Ah, si, quand même : la copine de Bill lui confie que le plus beau corps qu'elle ait jamais vu appartient à une de leurs anciennes condisciples, Doris, qui, depuis l'accident qui l'a défigurée, survit en posant en bikini pour des photographes. Alléché, Bill se rend chez elle et lui annonce qu'il pourra certainement lui rendre un visage présentable. Du coup, elle accepte de l'accompagner dans sa maison de campagne. Ouf, ça y est, on a trouvé la donneuse de corps, on sent que l'épilogue est proche.

Pendant ce temps-là, commandé par Jan, l'être du placard arrache à travers le judas le bras valide de Curt qui vient le nourrir. L'assistant ne crie pas. Il saigne à peine. Par contre, il se ballade pendant cinq bonnes minutes dans toute la baraque (c'est-à-dire les deux pièces précitées), avant de s'effondrer enfin contre un mur, mort. La scène est totalement ridicule, ce qui est dommage pour l'acteur jouant Curt, car c'était de loin le plus compétent du film.

Bref, Bill arrive avec Doris, lui sert un verre et, à la surprise générale, elle ne tarde pas à s'endormir, juste à temps pour être portée sur la table d'opération. Jan proteste, c'est trop horrible, il ne peut pas faire ça, c'est un crime, etc, etc... Du coup, pour la faire taire, Bill la bâillonne avec du sparadrap. Je rappelle que c'est sa fiancée, qu'il l'aime et qu'il est responsable de l'accident, mais bon, passons : à ce stade, il a passablement pété les plombs, de toute façon.

Là, se situe la plus belle scène du film. On se rend compte que Jan peut communiquer télépathiquement avec l'être du placard, qui recommence à tambouriner contre sa porte. Bill, déconcentré, s'interrompt avant de décapiter Doris et commence à errer dans la pièce, pour se poster JUSTE LE DOS AU JUDAS QU'IL A OUBLIE DE VERROUILLER UN PEU PLUS TOT. Vous avouerez que c'est pas de pot. Arrive ce qui doit arriver : un bras puissant l'empoigne et commence à l'étrangler. La porte se détache de ses gonds, si bien qu'un instant, les deux hommes luttent frénétiquement, séparés par un panneau de bois épais, ce qui est du plus haut comique. On découvre enfin l'être du placard, vaguement humanoïde mais franchement pas beau, faut admettre. On dirait un des extraterrestres à grosse tête des Survivants de l'Infini, mais en plus laid.

Climax : le mutant mord Bill à l'épaule et lui arrache un petit lambeau de chair dans lequel devait se trouver un organe vital, car notre chirurgien se retrouve aussitôt en train d'agoniser. Ensuite, le pauvre cobaye, qu'on imagine dirigé par les impulsions mentales de Jan, soulève Doris et la porte à l'extérieur de la maison qui, évidemment, est en train de brûler, vu que pendant la lutte, des produits chimiques se sont renversés, et que quand des produits chimiques se renversent, ils prennent systématiquement feu (sinon, où irait-on ? je vous le demande.)

FIN

Ah ? Bon, on suppose que la tête de Jan va être détruite par l'incendie, mais pour les deux autres, mystère. Oh, allez, si c'était le seul trou du scénario, je ne me sentirais pas de condamner le film pour ça.

J'ai rarement vu quelque chose d'aussi lamentable. La mise en scène est basique, franchement. Vous avez vu ce que donne l'histoire. Quant aux acteurs, euh... Jason Evers, qui joue Bill, a des faux airs de John Agar mais pas son talent (pourtant controversé) : il dit son texte avec un naturel relatif, mais ses expressions et sa gestuelle sont tellement exagérés qu'on jurerait un acteur du temps du muet. La fille qui joue Doris, c'est l'inverse : côté visuel, ça va, mais elle débite son texte comme une élève de CE2 sa récitation. Quant à Virginia Leith, alias Jan, elle n'a évidemment pas trop l'occasion de prouver qu'elle sait bouger, mais on l'entend abondamment parler et surtout rire. Et ce rire, mes enfants, c'est un poème. Genre trousseau de clef rouillé, au point qu'on a envie de la débrancher séance tenante pour que ça s'arrête. In-sup-por-ta-ble !

Bref : du nanar pur-jus, que même une bande originale faite de jazz d'ambiance sympa ne parvient pas à sauver de la catastrophe. Je crois bien que c'est encore plus mauvais que The Brain from Planet Arous, ce qui n'est pas peu dire.

Retour à la page BIS