Mosquito

Genre : dard des champs, dard de ville...

Fiche technique

Revue : Marc Madouraud

Mes biens chères soeurs, mes bien chers frères, je vous convie céans à une grande messe du sang, messe célébrée par de bien étranges prêtres : des moustiques géants !

Eh oui, nous allons parler de "Mosquito", celui de 1995, dont une des principales caractéristiques est qu'il a été écrit - et joué - par Gunnar Hansen, Leatherface en personne.

J'ai tellement vu de films où on pompait des dards que, pour une fois, en voir un où ce sont les dards qui pompent, ça change !

Tout commence par la chute d'une météorite dans un marécage, au fin fond d'une forêt américaine. Une météorite ? Non, un vaisseau spatial, et les moustiques du coin vont bien vite passer leur soif de sang sur le cadavre du pilote extra-terrestre... Chacun ses goûts.

Quelques temps après, un jeune couple assez horripilant, dont l'élément féminin s'en va rejoindre un camp de vacances pour tenir un rôle de Ranger, se prend un bestiau volant non identifié dans le pare-brise, de la taille d'un faon, en roulant tranquillement sur la route. La fille, visiblement mieux pourvue des neurones que son copain, croit reconnaître, dans le cadavre mutilé (celui du bestiau, pas de son ami), un insecte. Elle n'a pas tort, la mâtine (qui ne demande donc qu'à être sonnée, comme le veut la chanson) !

Ajoutez à ce passionnant prologue un vague humour potache qui transparaît lors d'une petite visite dans le parc, nous valant la rencontre avec quelques clichés pour comédies lourdingues : un ranger plutôt benêt et obsédé qui mate les belles vacancières à la jumelle, ou son chef à l'allure militaire très marquée et faisant une fixation sur les moustiques (la suite prouvera qu'il n'avait pas tort). Max Pecas n'est pas très loin (mais on se gardera de l'appeler).

A partir de là, vous vous en doutez, les attaques de moustiques géants vont se multiplier dans les environs du parc de loisirs. Un couple de campeurs est ainsi agressé en pleine forêt, juste après s'être livré à une autre sorte de plantage de piquet : l'homme alors qu'il est en train de vidanger sa Bud contre un arbre, la femme jusque dans la tente, où un moustique énamouré lui plante son dard... en plein dans la fesse droite ! (Bon, on va dire qu'il était myope). Le début de la scène nous vaut une des transparences les plus pourries de l'histoire des effets spéciaux : les moustiques en vol nocturne sont représentés par d'incertaines taches grisâtres sur la pellicule, évoquant plus l'ombre d'une maquette stylisée du bestiau que le diptère lui-même - la tache étant reproduite à l'identique plusieurs fois, pour donner l'idée d'une escadrille.

Des pêcheurs et un trio de gars en treillis sont aussi assaillis ; et seuls deux des derniers (dont le massif Gunnar "Leatherface" Hansen) en réchappent. Quand le jeune couple arrive au centre du parc, ils font la connaissance d'un expert en météorites venu là s'enquérir du truc tombé récemment (tiens, tiens !), et le trio découvre le ranger libidineux caché sous un canoë et passablement paniqué. Comme ils le constatent rapidement, toutes les personnes présentes dans le parc ont été victimes des moustiques, qui les ont transformées en cadavres tout secs, ridés et ratatinés d'un aspect des plus repoussants. Le nanarophile admirera au passage l'absolu manque de crédibilité dans l'emplacement des macchabées, comme si les diptérisés s'étaient prêtés de bonne grâce aux succions fatales de leurs tourmenteurs.

Aussi les quatre rescapés montent-ils dans un camping-car abandonné pour prendre la poudre d'escampette. En cours de route, ils sont interceptés par Gunnar et son acolyte (son frère), qui veulent s'emparer de force, arme au poing, du véhicule, car ce sont tout simplement des malfrats qui viennent de faire un hold-up et comptent s'éloigner au plus vite. Nos héros arrivent à les désarmer et les deux prisonniers embarquent avec eux.

Blasé, le spectateur, entre deux effets spéciaux ratés et quelque gag lourd, se dit depuis un moment qu'il est en train d'assister à un des plus nullards films de bestioles géantes jamais réalisés, et pense sérieusement à aller faire quelque chose de plus intéressant.

Mais, soudain, le metteur en scène se souvient qu'il est (visiblement) un fan de John Ford et de John Carpenter, et nous propose une petite attaque du camping-car (lancé à toute allure) par les moustiques assez réussie. Nous avons là de l'action, un suspense raisonnable, et un rythme soutenu : un scène qui rappelle beaucoup l'assaut de la diligence par les indiens dans "La Chevauchée fantastique". Un peu plus loin, accident ! Le bahut sort de la route et se retourne ! Ses occupants n'ont que le temps de sortir pour aller se réfugier plus loin ; les moustiques arrivent dard-dard..., euh, dare-dare, et trucident le frangin de Gunnar qui s'était attardé pour récupérer le butin du hold-up.

Les autres pénètrent dans un réseau de grosses canalisations, style égout, et sont talonnés par les bêbêtes. Ils échouent dans un carrefour souterrain auquel mènent plusieurs boyaux. Bien évidemment, chaque accès est envahi par les moustiques géants et les humains doivent subir un siège en bonne et due forme, se défendant âprement à coups de flingues et de chemises enflammées (mais pas de sous-tif enflammé, ce qui est un peu dommage). Là encore, la scène, très carpenterienne, mérite l'attention du spectateur.

Ouf, encore sauvés ! Mais voilà-t-il pas que notre club des cinq trouve refuge, un peu plus loin, dans une grosse maison en bois. Mauvaise pioche, car le sous-sol, trop hâtivement exploré par le ranger lubrique, n'abrite rien d'autre que le nid des insectes. Et nos amis sont bientôt assiégés tant par les moustiques de l'extérieur qui veulent rentrer au bercail, que par les larves du bas qui ont éclos et se disent : " Hum, miam miam, du bon sang ! " Ils décident donc de faire péter la maison au gaz de cuisine, en s'échappant au dernier moment par le toit (pas sûr que ce soit un plan d'enfer, mais, bon, dans leur situation on ferait peut-être aussi des conneries).

Ce qui nous vaut quelques dernières belles scènes : le ranger, qui tente de monter à l'étage grâce à un monte-charge, voit l'appareil se détraquer et va s'écraser dans la cave en plein milieu du nid ; Gunnar, qui se rappelle ses jeunes années, s'empare d'une tronçonneuse et s'empresse de faire de l'escrime contre les dards des moustiques. Emouvant.

Enfin, tout pète. Les deux jeunes sont les seuls à être sortis de la maison (dommage). Contre toute attente et toute logique, l'explosion a éradiqué les diptères hypertrophiés dans et hors de la baraque. A l'intérieur, les jeunots découvrent leur pote amateur de météorites, qui a eu la présence d'esprit de se planquer dans un frigo vide !

Bon, finalement le super-méga-navet que l'on subodorait au départ est en grande partie racheté par la dernière demi-heure, plutôt bien menée et rythmée pour un aussi petit budget, nous faisant oublier les transparences désastreuses et le jeu des acteurs (le couple-vedette est particulièrement mauvais, obligeant ses partenaires à surjouer).

Notons que le réalisateur Gary Jones, qui a commencé sa carrière sur les séries télévisées de Sam Raimi, a encore donné, par la suite, dans la grosse bêbête qui monte (pas au box-office, mais à l'assaut des héros) avec le regardable "Spiders" (2000) avec ses araignées géantes, puis "Crocodile 2 : Death Swamp" (2001) où il sacrifie cette fois-ci au reptile surdimensionné. Dire qu'à son âge il s'amuse toujours au vieux jeu du " j'en ai une plus grosse que toi ", auquel s'adonnait en son temps Bert I. Gordon...

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