The She-Beast

Genre : sorcière dans le style Barbara

Fiche technique

Revue : Michel Pagel

Voici donc le tout premier film en tant que réalisateur de Michael Reeves qui nous donnerait ensuite THE SORCERERS (bof) et ce chef d'oeuvre incontestable qu'est WITCHFINDER GENERAL.

LA SORELLA DI SATANA fait un peu figure de mythe parce qu'il était jusqu'ici très rare en vidéo et qu'à part les vétérans l'ayant vu en salles à sa sortie (Non, Thomas, pas celui-là, je ne te crois pas), personne ne l'avait jamais visionné (du moins parmi mes connaissances, mais l'un d'entre vous me fera peut-être mentir). Comme Barbara Steele est au générique, y avait de quoi fantasmer.

Autant le dire tout de suite, Michael Reeves reste l'homme d'un seul film, car celui-ci n'est pas le "grand film perdu de Barbara Steele" qu'on pouvait espérer. D'abord, Barbara, en tout et pour tout, on la voit dix minutes au début et vingt secondes à la fin, et elle n'a franchement pas grand-chose à faire.

Je ne vais pas m'attarder sur la réalisation. La plupart du temps banale, elle offre au détour de quelques plans un avant-goût du Reeves de Witchfinder General, mais sans plus. Cela dit mon jugement est peut-être faussé du fait que la copie DVD que j'ai récupérée n'est pas en cinémascope, ni même en pan & scan. L'image est juste agrandie aux dimensions de l'écran, si bien qu'on en rate la moitié sur les côtés. En plus, y a pas de remastering digital, si bien que la qualité est celle d'une vieille cassette NTSC aux couleurs délavées (ah ! ces roses et ces mauves gerbeux qui surgissent immanquablement sur les cassettes NTSC. Comment font-ils ?) Bref, la réalisation, donc, RAS.

Deux mots du scénar : la première scène se passe au XVIIIe siècle. On y voit une bande de braves paysans transylvaniens exécuter une sorcière vraiment pas belle (la She-Beast du titre anglais) avec des raffinements de cruauté. Bien sûr, avant de mourir, elle jure de se venger et profère ces mots devenus célèbres (quoique pour une autre raison, il me semble) : "I'll be back". Pouf ! L'action se transporte de nos jours (enfin... dans les années 60). Un couple anglais arrive en Transylvanie pour son voyage de noces. Là, avouez que c'est chercher la merde, quand même. Qu'on veuille faire original et éviter Venise, bon, mais la Transylvanie, quand on est personnage de film d'horreur, c'est du vice. Le jeune couple en question, c'est bien sûr Barbara Steele au bras de Ian Ogilvy (qui est sauf erreur dans tous les films de Reeves). A peine arrivés, il croisent le comte Van Helsing, un vieillard barbichu qui admet que sa famille est responsable de la chute de celle des Dracula. Euh... Van Helsing en aristocrate transylvanien ? Moi, je veux bien, mais c'est pas le souvenir que j'en avais. Enfin... si ça leur fait plaisir. Ledit Van Helsing (c'est fou ce que ça sonne transylvanien, en plus, comme nom) est ruiné depuis la révolution communiste et vit dans une espèce de caverne proche de l'hôtel où nos tourtereaux s'arrêtent. "Hôtel" est un grand mot : c'est un infect trou à rats, tenu par un transylvanien gros et répugnant, le beauf de base (d'ailleurs, à part Van Helsing, tous les autochtones, communistes ou pas, ont l'air de parfaits abrutis, ce qui frôle l'acharnement) et obsédé sexuel en prime. Ian et Barbara se retrouvent dans une chambre dont vous ne voudriez pas comme chiottes d'appoint au fond du jardin, ce qui conduit la jeune femme à faire remarquer à son époux qu'il a une conception très personnelle des voyages de noces — et on ne saurait lui donner tort. Mais, bon, comme ils s'aiment, ils baisent quand même (non, les appas de Barbara ne sont pas dévoilés). L'hôtelier s'enhardissant jusqu'à les observer par la fenêtre, il se fait tabasser par le jeune marié, au point qu'on a bien l'impression qu'il est mort. Mais c'est juste que la scène est mal foutue, parce qu'en fait, il se relève quelques minutes plus tard, pas plus éprouvé que ça. Quant à notre couple, me direz-vous, il remonte immédiatement dans sa voiture pour aller ailleurs ? Non, non. Pourquoi s'embêter ? Là, on a un lit. D'accord, il est plein de cafards et la piaule pue le rat crevé, sans compte que je viens d'estourbir le patron pour le compte, qu'il voudra sans doute se venger et que la porte ne ferme pas, mais on va quand même pas prendre la bagnole en pleine nuit pour si peu, hein ? Il ont raison, notez, vu qu'il ne leur arrive rien pendant la nuit. Et le lendemain matin, ils prennent bel et bien la bagnole et ils s'en vont.

Alors qu'ils approchent d'un lac, Ian perd le contrôle de son véhicule et finit à la flotte après avoir failli percuter un poids lourd. Le lac, c'est celui dans lequel on a noyé la sorcière au début. Je le précise parce que j'ai oublié de dire qu'on l'avait noyée dans un lac, sinon je pense que vous auriez trouvé tout seuls.

Ian ressort vivant de la bagnole coulée, pas Barbara. Le chauffeur les ramène à l'hôtel, dont le patron est un copain à lui. Lorsqu'il revient à lui, Ian demande à voir son épouse mais, ô surprise, quand il déroule la couverture dont on l'a enveloppée, il découvre à la place l'horreur velue et griffue dont il a déjà été question. Van Helsing ne tarde pas à expliquer les événements : l'immonde sorcière met sa malédiction à exécution ; elle revit en empruntant l'esprit de Barbara. Personnellement, je n'ai pas bien compris comment elle s'y prend exactement, mais bon, si le savant de service nous l'assure, on ne peut que le croire. Donc il faut exorciser la sorcière pour retrouver une Barbara intacte. OK, ça roule.
Pour ça, Van Helsing commence par la réveiller, ladite sorcière, ce qui paraît un brin curieux, vu qu'il va ensuite passer l'essentiel du film à essayer de l'anesthésier afin de l'empêcher de nuire et de l'exorciser tranquillement.

Bon bref, ensuite la sorcière tue un ou deux personnages, la police s'en mêle et il s'ensuit une course-poursuite carrément tournée burlesque (volontairement, veux-je dire) durant laquelle nos héros et les flics se disputent le corps anesthésié (par Van Helsing, donc) de la méchante. Dans les films, en général, les héros ne tirent pas sur les flics, mais là ce sont des flics transylvaniens communistes, alors ça ne compte pas. Bref, à la surprise générale, Van Helsing réussira son exorcisme et la superbe Barbara nous reviendra, éprouvée mais indemne. Et à la fin, génial retournement de situation, alors que tout ce beau monde s'en retourne vers l'Angleterre, elle prononce ces mots : "I'll be back", destinés à nous faire comprendre ce que vous avez bien sûr compris, sinon c'est à désespérer. Voilà, fin.

Le film est dans l'ensemble assez incohérent. Les caricatures de transylvaniens obtus sont à la limite du supportable, et le ton hésite nettement trop entre le gothique à la Hammer et la comédie pure, la seconde privant le premier de toute crédibilité sans être assez appuyée pour qu'on l'apprécie pour elle-même.

Reste que Ian Ogilvy fait son boulot correctement et qu'on peut s'amuser d'un vague parallèle opéré entre communisme et vampirisme, mais ça fait peu. Sacrément peu.

En gros : un ratage même pas très intéressant. Et puis surtout, nom d'un chien, ON NE VOIT PAS ASSEZ BARBARA STEELE !!!! (Pardon, je m'énerve, mais je suis déçu, quoi...)

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